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maximes & sa conduite cette opposition monstrueuse qui déshonore nos mœurs ou notre raison, & l’on ne sauroit, peut-être, citer une seule de ses actions qui ne montre, avec la force de cette grande ame, faite pour soumettre ses passions à l’empire de sa volonté, la force plus puissante de la grace, faite pour soumettre en toutes choses sa volonté à celle de son Dieu.

Toutes ses vertus ont porté cette divine empreinte du christianisme ; c’est dire assez combien elles ont effacé l’éclat des vertus humaines, toujours si empressées à s’attirer cette vaine admiration qui est leur unique récompense, & qu’elles perdent pourtant encore comparées à celles du vrai chrétien. Les plus grands hommes de l’antiquité se seroient honorés de voir son nom inscrit à côté des leurs, & ils n’auroient pas même eu besoin de croire comme lui, pour admirer & respecter ces vertus héroïques qu’il consacroit ou sacrisioit toutes au triomphe de sa foi.

Il étoit humble ; non de cette fausse & trompeuse humilité qui n’est qu’orgueil ou bassesse d’ame ; mais d’une humilité pieuse & discrète, également convenable à un chrétien pécheur & à un grand Prince qui, sans avilir son titre fait humilier sa personne. Vous l’avez vu, Messieurs, modeste dans son élévation & grand dans sa vie privée, simple comme l’un de nous, renoncer à la pompe consacrée à son rang sans renoncer à sa dignité : vous l’avez vu, dédaignant cette grandeur apparente dont personne n’est si jaloux que ceux qui n’en ont point de réelle, ne garder des honneurs dûs à sa naissance que ce qu’ils avoient pour lui de pénible, ou ce qu’il n’en pouvoit