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s’il ne s’y étoit pas conformé. Il répondra, sans doute à cela, que tout habitant de la société doit faire ce que les autres sont : se livrer au torrent & ne pas se singulariser : que la misanthropie n’est plus à la mode : qu’il faut observer un juste milieu entre l’austérité d’une saine Philosophie & la corruption des mœurs : enfin qu’il faut être de mise & se plier au goût général. Hélas ! ce philosophe Anglois dégénere furieusement du titre que la complaisance publique lui a prodigué.

Ecoutons M. Hume lui-même. C’est dans le livre intitulé les Pensées de cet historien qu’il saisit l’occasion de se peindre de se caractériser. La copie ressemble si parfaitement à cet auteur, que l’on ne peut s’y méprendre ; les coups de pinceaux du peintre témoignent que l’artiste avoit eu le loisir de bien étudier les traits de l’original.

Ô Philosophie ! ta vertu est stérile & ta sagesse n’est que vanité. Tu cours après les stupides applaudissemens des hommes.

Tu ne cherches ni le solide témoignage de ta conscience, ni l’approbation infiniment plus solide encore de cet Etre qui, d’un seul de ses regards, pénetre tous les abymes de l’univers. Pourrois-tu ne point sentir combien ta probité est chimérique ! Tu te glorifies des beaux noms de citoyens, de fils, d’ami....Tu es toi -même ta propre idole, tu n’encenses que tes perfections imaginaires, & tu ne cherches qu’à flatter ton orgueil en te faisant un nombreux cortege d’admirateurs ignorans.*

[*Pensées de M. Hume.]

La preuve d’un orgueil démesuré dans un petit particulier