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tous genres, à qui cet usurier ne procuroit que la vie & l’habit, tandis qu’il acquéroit à leurs dépens l’immense fortune dont il jouit.

Je pourrois appliquer à la plupart des Libraires de Londres, à quantité de négocians & de mécaniciens, cette trop coupable industrie envers ceux qu’ils sont travailler comme des esclaves, pour ne leur accorder non pas de quoi vivre, mais uniquement de quoi languir & ne pas mourir de faim.

Si ceux qui se sont enrichis en Angleterre par le moyen des productions de J. J. Rousseau, avoient tant soit peu de conscience & d’équité, ce Genevois seroit bientôt à couvert des injures de la fortune.

La lettre écrite par J. J. Rouleau de Motiers-Travers, en février 1763, n’a pas été écrite par Rousseau malade, mais par Rousseau se portant bien. Elle développe avec toute la sagacité & la noblesse convenables, les sentimens de la plus vive reconnoissance & de l’amitié la plus sincere pour les offres généreuses que M. Hume lui faisoit. L’auteur d’Emile ne s’y déguise point : les aveux sont naïfs ; les transports de son ame s’y sont sentir avec cette véhémence qu’inspirent la sagesse & la probité.

Je défie que l’on puisse jamais arracher de la plume d’un homme né méchant, quelque éloquent qu’il soit, des expressions aussi pures & aussi naturelles que celles dont il se sert pour faire connoître les replis les plus secrets de son cœur. Ce n’est point le langage affectueux de ce siecle, c’est celui des hommes des premiers tans, où la franchise & la sincérité se glorifioient de paroître avec toutes les beautés qui les accompagnoient alors.