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mœurs douces & simples, beaucoup de droiture, de candeur & de bonté ; & la modération de son caractere se peint dans ses écrits.

Il a employé les grands talens qu’il a refus de la nature & les lumieres qu’il a acquises par l’étude, à chercher la vérité & à inspirer l’amour des hommes. Jamais il n’a prodigué son tans & compromis son repos dans aucune querelle ni littéraire ni personnelle, &c.

La suite du panégyrique n’est qu’un reste de fumée échappée de l’encensoir, pour dissiper les exhalaisons. Je la supprimé pour vous faire remarquer Messieurs, que voilà en bien peu de lignes la peinture d’un homme accompli, c’est-à-dire, du sage qui l’emporte de beaucoup sur tous ceux dont Plutarque nous a fait les portraits.

Il ne m’appartient pas de démentir un éloge aussi pompeux & si prévenant en saveur du célébré Ecrivain, qui peut-être lui-même ne s’y reconnoît pas, parce que je me persuade qu’il n’a pas encore assez d’orgueil & d’amour-propre pour se croire infaillible. S’il se croyoit tel, je le prierois de se ressouvenir que feu M. le général Barrington fut obligé, en 1762, d’envoyer à M. Smolet, autre historien non moins estimé en Angleterre & dans la République des Lettres que son émule, une relation authentique de la conquête de la Guadaloupe, afin de détromper le public & l’instruire d’une vérité négligée par M. Hume : vérité importante & qui ne l’étoit pas moins pour la réputation du général Anglois, que pour les intérêts particuliers des Insulaires qui venoient d’être conquis.

Cette anecdote qui paroît tout-à-fait étrangere à mon sujet,