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pas nous en appercevoir. M. Hume pouvoit-il soupçonner J. J Rousseau d’une pareille hypocrisie !

Je le répété, qu’on lise sans partialité la lettre de Rousseau à M. Hume ; & on y reconnoîtra un honnête homme, déchiré par les inquiétudes les plus cruelles, faisant continuellement l’éloge d’un homme qu’il a cru digne de son estime & de son amitié, dans le tans même qu’il l’accable des reproches les plus amers, parce qu’il s’en croit trahi : quoi de plus touchant quoi de plus attendrissant que la fin de cette lettre ! “Je suis, dit-il ; le plus malheureux des hommes si vous en êtes le plus coupable, je suis le plus vil, si vous êtes innocent ; vous me faites desirer d’être cet objet méprisable ; oui l’état où je me verrois prosterné, soulé sous vos pieds criant miséricorde, & faisant tout pour l’obtenir, publiant à haute voix mon indignité, & rendant à vos vertus le plus éclatant hommage, seroit pour mon cœur un état d’épanouissement & de joie, après l’état d’étoussement & de mort où vous l’avez réduit..... si vous êtes innocent, daignez-vous justifier, je connois mon devoir, je l’aime, & je l’aimerai toujours quelque rude qu’il puisse être ; il n’y a pas d’abjection dont un cœur qui n’est pas né pour elle, ne puisse revenir : encore un coup, si vous êtes innocent daignez - vous justifier.” Peut - on faire un plus bel éloge de l’amitié de M. Hume ! J. J. Rousseau malgré la violence de ses soupçons, malgré même ses convictions, craint cependant d’être dans l’erreur, il desire d’y être, il desire qu’on la lui fasse connoître, & alors rien ne lui coûte ; l’état le plus vil devient pour son cœur un état d’épanouissement & de joie, il se trouve