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d’être l’objet de ses attentions, de celles de son Ministre, le desir de marquer combien j’y étois sensible, même l’avantage d’être un peu plus au large en approchant de la vieillesse, accablé d’ennuis & de maux, enfin l’embarras de trouver une excuse honnête pour éluder un bienfait déjà presqu’accepté ; tout me rendoit difficile & cruelle la nécessité d’y renoncer ; car il le falloit assurément, ou me rendre le plus vil de tous les hommes, en devenant volontairement l’obligé de celui dont j’étois trahi. "

"Je fis mon devoir, non sans peine ; j’écrivis directement à M. le général Conway, & avec autant de respect & d’honnêteté qu’il me fut possible, sans refus absolu, je me défendis pour le présent d’accepter. M. Hume avoit été le négociateur de l’affaire, le seul même qui en eut parlé ; non-seulement je ne lui répondis point, quoique ce fût lui qui m’eût écrit, mais je ne dis pas un mot de lui dans ma lettre. Troisieme soufflet sur la joue de mon patron, & pour celui-là, s’il ne le sent pas, c’est assurément sa faute ; il n’en sent rien."

"Ma lettre n’étoit pas claire, & ne pouvoit l’être pour M. le général Conway, qui ne savoit pas à quoi tenoit ce refus, mais elle l’étoit fort pour M. Hume qui le savoit très-bien ; cependant il feint deprendre le change tant sur le sujet de ma douleur, que sur celui demon refus, & dans un billet qu’il m’écrit, il me fait entendre qu’on me ménagera la continuation des bontés du Roi si je me ravise sur la pension. En un mot il prétend à toute force, & quoi qu’il arrive, demeurer mon patron malgré moi. Vous jugez bien,