Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/329

Cette page n’a pas encore été corrigée

rare dans son état, je ne pouvois que me glorifier d’avoir pour bienfaiteurs trois des hommes du monde que j’aurois le plus desirés pour amis. Aussi, loin de me refuser à la pension offerte, je ne mis pour l’accepter qu’une condition nécessaire, savoir, un consentement dont, sans manquer àmon devoir, je ne pouvois me passer."

"Honoré des empressemens de tout le monde, je tâchois d’y répondre convenablement. Cependant ma mauvaise fauté & l’habitude de vivre à la campagne me firent trouver le séjour de la ville incommode. Aussi-tôt les maisons de campagne se présentent en foule ; on m’en offre à choisir dans toutes les provinces. M. Hume se charge des propositions, il me les fait, il me conduit même à deux ou trois campagnes voisines ; j’hésite long-tems sur le choix ; il augmentoit cette incertitude. Je me détermine enfin pour cette province & d’abord M. Hume arrange tout ; les embarras s’applanissent ; je pars, j’arrive dans cette habitation solitaire, commode, agréable ; le maître de la maison prévoit tout, pourvoit à tout ; rien ne manque. Je suis tranquille, indépendant ;, voilà le moment si desiré où tous mes maux doivent finir. Non, c’est-là qu’ils commencent, plus cruels que je ne les avois encore éprouvés."

"J’ai parlé jusqu’ici d’abondance de cœur, & rendant avec le plus grand plaisir justice aux bons offices de M. Hume. Que ce qui me reste à dire, n’est-il de même nature ! Rien ne me coûtera jamais de ce qui pourra l’honorer. Il n’est permis de marchander sur le prix des bienfaits que quandon nous accuse d’ingratitude, & M. Hume m’en accuse