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ce que je dois penser de lui. Malgré la longueur de ma lettre, je n’y suivrai point d’autre ordre que celui de mes idées, commençant par les indices & finissant par la démonstration."

"Je quittois la Suisse, fatigué de traitemens barbares, mais qui du moins ne mettoient en péril. que ma personne & laissaient mon honneur en sureté. Je suivois les mouvemens de mon cœur pour aller joindre Mylord Maréchal ; quand jereçus à Strasbourg de M. Hume l’invitation la plus tendrede passer avec lui en Angleterre, où il me promettoit l’accueil le plus agréable, & plus de tranquillité que je n’y en ai trouvé. Je balançai entre l’ancien ami & le nouveau, j’eus tort ; jepréférai ce dernier, j’eus plus grand tort : mais le plaisir de connoître par moi - même une nation célebre dont on me disoit tant de mal & tant de bien, l’emporta. Sûr de ne pas perdre George Keith, j’étois flatté d’acquérir David Hume. Son mérite, les rares talens, l’honnêteté bien établie de son caractere me faisoient desirer de joindre son amitié à celle dont m’honoroit son illustre compatriote ; & je me faisois une sorte de gloire de montrer un bel exemple aux gens de Lettres, dans l’union sincere de deux hommes dont les principes étoient si différens."

"Avant l’invitation du Roi de Prusse & de Mylord Maréchal, incertain sur le lieu, de ma retraite, j’avois demandé & obtenu parmes amis un passe-port de la Cour de France, dont je me servis pour aller à Paris joindre M. Hume. Il vit, & vit trop peut-être, l’accueil que je reçus d’un grand Prince, & j’ose dire, du public. Je prêtai par devoir,