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affermé qu’appercevoir comparer sont la même chose, l’auteur conclut en grand appareil que juger c’est sentir. La conclusion me paraît claire ; mais c’est de l’antécédent qu’il s’agit.

Je viens à l’objection la plus forte de toutes celles que renferment les notes du citoyen de Genève, & qui alarma le plus Helvétius, lorsque je la lui communiquai. L’auteur répete sa conclusion d’une autre manière *

[*Page 9.] & dit : "La conclusion de ce que je viens de dire, c’est que, si tous les mots des langues ne désignent jamais que des objets, ou les rapports de ces objets avec nous & entr’eux, tout l’esprit par conséquent consiste à comparer & nos sensations & nos idées ; c’est-à-dire à voir les ressemblances & les différences, les convenances & les disconvenances qu’elles ont entr’elles. Or, comme le jugement n’est que cette appercevance elle-même, ou du moins que de cette appercevance, il s’ensuit que opérations de l’esprit se réduisent à juger.”Rousseau oppose à cette conclusion une distinction si lumineuse qu’elle suffit pour éclaircir entièrement cette question, & dissiper les ténèbres dont la fausse philosophie cherche à envelopper les jeunes esprits. APPERCEVOIR LES OBJETS, dit-il, C’EST SENTIR ; APPERCEVOIR LES RAPPORTS, C’EST JUGER. Ce peu de mots n’a pas besoin de commentaire, ils serviront à jamais bouclier contre toutes les entreprises des matérialistes pour anéantir dans l’homme la substance spirituelle. Ils établissent clairement, non deux puissances passives, comme le dit M. Helvétius au commencement de son ouvrage ; mais