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bonheur. J’ai prévu qu’en me bornant à montrer combien la plupart des raisonnemens*

[* II y auroit de l’injustice à dire que tous les raisonnemens de M. Rousseau sont défectueux. Cette proposition doit être modifiée. Il mérite beaucoup d’éloges pour s’être élevé avec forcé contre les abus qui se glissent dans les Arts & dans la République des Lettres. (Note de l’Auteur de la réfutation.) ] de M. Rousseau sont défectueux, je tomberois dans la sécheresse du genre polémique. Cet inconvénient ne m’a point arrêté, persuadé que la solidité d’une réfutation de cette nature fait son principal mérite.

Si, comme l’Auteur le prétend, les Sciences dépravent les mœurs, Stanislas le bienfaisant sera donc blâmé par la postérité d’avoir fait un établissement pour les rendre plus florissantes ; & son Ministre, d’avoir encouragé les talens & fait éclater les siens : si les Sciences dépravent les mœurs, vous devez donc détester l’éducation qu’on vous a donnée, regretter amérement le tems que vous avez employé à acquérir des connoissances, & vous repentir des efforts que vous avez faits pour vous rendre utiles à la Patrie. L’Auteur que je combats est l’apologiste de l’ignorance : il paroît souhaiter qu’on brûle les bibliothéques ; il avoue qu’il heurte de front tout ce qui fait aujourd’hui l’admiration des hommes, & qu’il ne peut s’attendre qu’à un blâme universel ; mais il compte sur les suffrages des siecles à venir. Il pourra les remporter, n’en doutons point, quand l’Europe retombera dans la barbarie ; quand sur les ruines des Beaux- Arts éplorés, triompheront insolemment l’ignorance & la rusticité.

Nous avons deux questions à discuter, l’une de fait, l’autre