Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t13.djvu/538

Cette page n’a pas encore été corrigée

duchesse, vous dédommager des plantes, si elles étoient plus abondantes, mais vous pardonnerez leur misere aux divers accidens qui ont là-dessus contrarié mes soins. Quelques-uns de ces accidens ne laissent pas d’être risbles, quoi qu’ils m’ayent donné bien du chagrin. Par exemple, les rats ont mangé sur ma table presque toute la graine de bistorte que j’y avois étendue pour la faire sécher ; & ayant mis d’autres graines sur ma fenêtre pour le même effet, un coup de vent a fait voler dans la chambre tous mes papiers, & j’ai été condamné à la pénitence de Psyché, mais il a fallu la faire moi-même & les fourmis ne sont point venues m’aider. Toutes ces contrariétés m’ont d’autant plus fâché que j’aurois bien voulu qu’il pût aller jusqu’à Callwich un peu du superflu de Bullstrode, mais je tâcherai d’être mieux fourni une autre fois ; car quoique les honnêtes gens qui disposent de moi, fâchés de me voir trouver des douceurs dans la botanique, cherchent à me rebuter de cet innocent amusement en y versant le poison de leurs viles ames ; ils ne me forceront jamais à y renoncer volontairement. Ainsi, Madame la duchesse, veuillez bien m’honorer de vos ordres & me faire mériter le titre que vous m’avez permis de prendre ; je tâcherai de suppléer à mon ignorance à force de zele pour exécuter vos commissions.

Vous trouverez, Madame, une Ombellifere à laquelle j’ai pris la liberté de donner le nom de Seseti Halleri faute de savoir la trouver dans le Species, au lieu qu’elle est bien décrite dans la derniere édition des plantes de Suisse de M. Haller N°. 762. C’.est une très-belle plante qui est plus belle encore en ce pays que dans les contrées plus méridionales, parce que les