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Mais, Madame, que sert de tergiverser ? Le fait même est votre juge. Il est clair comme le soleil que vous recherchez à noircir bassement une dame qui s’est sacrifiée sans ménagement pour vous tirer d’embarras. L’intérêt de quelques pistoles vous porté à payer d’une noire ingratitude un des bienfaits le plus important que vous pussiez recevoir, & quand toutes vos calomnies seroient aussi vraies qu’elles sont fausses, il n’y a point cependant de cœur bien fait qui ne rejette avec horreur les détours d’une conduite aussi messéante que la vôtre.

Mais, grâces à Dieu, il n’est pas à craindre que vos discours fassent de mauvaises impressions sur ceux qui ont l’honneur de connoître Madame la baronne, ma marraine ; son caractere & ses sentimens se sont jusqu’ici soutenus avec assez de dignité pour n’avoir pas beaucoup à redouter des traits de la calomnie ; & sans doute, si jamais rien a été opposé à son goût, c’est l’avarice & le vil intérêt. Ces vices sont bons pour ceux qui n’osent se montrer au grand jour ; mais pour elle ses démarches se sont à la face du ciel, & comme elle n’a rien à cacher dans sa conduite, elle ne craint rien des discours de ses ennemis. Au reste, Madame, vous avez inséré dans votre lettre certains termes grossiers, au sujet d’un collier de grenats, très-indignes d’une personne qui se dit de condition, à l’égard d’une autre qui l’est de même, & à qui elle a obligation. On peut les pardonner au chagrin que vous avez de lâcher quelques pistoles & d’être privée de votre cher argent ; & c’est le parti que prendra Madame de Warens, en redressant cependant la fausseté de votre exposé.

Quant à moi, Madame, quoique vous affectiez de parler