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rodomont hors de propos, & que je me suis raisonnablement humanisé. Je sais bien, Dieu merci, à quoi, sans cela, Petit auroit couru grand risque de mourir de faim en pareille occasion ; preuve que je ne suis pas propre à ramper indignement dans les malheurs de la vie, c’est que je n’ai jamais fait le rogue, ni le fendant dans la prospérité mais qu’est-ce que je vous lanterne-là ? Sans me souvenir, chere maman, que je parle à qui me connaît mieux que moi-même. Baste ; un peu d’effusion de cœur dans l’occasion ne nuit jamais à l’amitié.

Le mémoire est tout dressé sur le plan que nous avons plus d’une fois digéré ensemble. Je vois le tout assez lié, & propre à se soutenir. Il y a ce maudit voyage de Besançon, dont, pour mon bonheur, j’ai jugé à propos de déguiser un peu ce motif. Voyage éternel & malencontreux, s’il en fût au monde, & qui s’est déjà présenté à moi bien, des fois, & sous des faces bien différentes. Ce sont des images où ma vanité ne triomphe pas. Quoi qu’il en soit, j’ai mis à cela une emplâtre, Dieu sait comment ! en tout cas, si l’on vient me faire subir l’interrogatoire aux Charmettes, j’espere bien ne pas rester court. Comme vous n’êtes pas au fait comme moi, il sera bon, en présentant le mémoire, de glisser légèrement sur le détail des circonstances, crainte de qui pro quo, à moins que je n’aye l’honneur de vous voir avant ce tans-là.

À propos de cela. Depuis que vous voilà établie en ville, ne vous prend-il point fantaisie, ma chere maman, d’entreprendre un jour quelque petit voyage à la campagne ? Si mon