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Vos maximes, mon très-cher hôte, sont très-stoïque & très-belles, quoiqu’un peu outrées, comme sont celles de Séneque, & généralement celles de tous ceux qui philosophent tranquillement dans leur cabinet sur les malheurs dont ils sont loin, & sur l’opinion des hommes qui les honore. J’ai appris assurément à n’estimer l’opinion d’autrui que ce qu’elle vaut, & je crois savoir, du moins aussi bien que vous, de combien de choses la paix de l’ame dédommage ; mais que seule elle tienne lieu de tout, & rende seule heureux les infortunés ; voilà ce que j’avoue ne pouvoir admettre, ne pouvant tant que je suis homme, compter totalement pour rien la voix de la nature patissante & le cri de l’innocence avilie. Toutefois, comme il nous importe toujours, & sur-tout dans l’adversité, de tendre à cette impassibilité sublime à laquelle vous dites être parvenu, je tâcherai de profiter de vos sentences, & d’y faire la réponse que fit l’architecte Athénien à la harangue de l’autre. Ce qu’il a dit, je le serai.

Certaines découvertes, amplifiées peut-être par mon imagination, m’ont jetté durant plusieurs jours dans une agitation fiévreuse qui m’a fait beaucoup de mal ; & qui, tant


dégénere pas en folie....... que dites vous de ses allées & venues......il n’est bien nulle part...... C’EST UN VOYAGEUR PERPETUEL.

Ce n’est pas sur le discours philosophique que j’appuye. Je ne m’arrête qu’à ces mots : un voyageur perpétuel. Il est bien singulier que le maraud de Thevenin ait eu la même idée, & bien long-tems après ; & que M. Rousseau l’ait fait naître, lui qui depuis son retour d’Italie à Paris jusqu’à son départ pour la Suisse, n’avoit fait qu’un voyage en dix-huit ans.

Mais chaque siecle a eu son genre de persécution, & tel qui s’est livre à ridiculiser Rousseau, n’auroit peut-être pas été des derniers à accuser Socrate.”]