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de lui donner votre confiance. Il n’est pas croyable que, pouvant être l’admiration de l’univers, il veuille en devenir l’horreur. Il sent trop bien l’avantage de sa position pour ne pas la mettre à profit pour sa gloire. Je ne puis penser qu’il veuille, vous trahissant, se couvrir d’infamie. En un mot, il est votre unique ressource ; ne vous l’ôtez pas. S’il vous trahit us êtes perdus, je l’avoue ; mais vous l’êtes également s’il ne se mêle pas de vous. Livrez-vous donc à lui rondement & franchement ; gagnez son cœur par cette confiance.

Prêtez-vous à tout accommodement raisonnable. Assurez les loix & la liberté ; mais sacrifiez l’amour-propre à la paix. Sur-tout aucune mention de moi pour ne pas aigrir ceux qui me haïssent ; & si M. de Voltaire vous sert comme il le doit, s’il entend sa gloire, comblez-le d’honneurs, & consacrez à Apollon pacificateur, Phoebo pacatori, la médaille que vous m’aviez destinée.

LETTRE AU MÊME.

Chiswick le 29 Janvier 1766.

Je suis arrivé heureusement dans ce pays ; j’y ai été accueilli, & j’en suis très-content : mais ma santé, mon humeur, mon état demandent que je m’éloigne de Londres ; & pour ne plus entendre parler, s’il est possible, de mes malheurs, je vais dans peu me confiner dans le pays de Galles. Puissai-je y mourir en paix ! c’est le seul vœu qui me reste à faire. Je vous embrasse tendrement.