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cruel zele qui l’a pris subitement. Quel étoit son objet, quel est- il à présent ? Je l’ignore : je sais seulement qu’il ne sauroit être bon. Non-seulement il m’admet avec empressement, avec honneur à la Communion, mais il me recherche, me prône, me fête, quand je parois avoir attaqué de gaîté de cœur le Christianisme ; & quand je prouve qu’il est faux que je l’aye attaqué, qu’il est faux du moins que j’aye eu ce dessein, le voilà lui-même attaquant brusquement ma sureté, ma foi, ma personne ; il veut m’excommunier, me proscrire ; il ameute la paroisse après moi, il me poursuit avec un acharnement qui tient de la rage. Ces disparates sont-elles dans son devoir ? Non, la charité n’est point inconstante, la vertu ne se contredit point elle-même, & la conscience n’a pas deux voix. Après s’être montré si peu tolérant, il s’étoit avisé trop tard de l’être ; cette affectation ne lui alloit point, & comme elle n’abusoit personne, il a bien fait de rentrer dans son état naturel. En détruisant son propre ouvrage, en me faisant plus de mal qu’il ne m’avoit fait de bien, il m’acquitte envers lui de toute reconnoissance ; je ne lui dois plus que la vérité, je me la dois à moi-même ; & puisqu’il nue force à la dire, je la dirai.

Vous voulez l’avoir au vrai ce qui s’est passé entre nous dans cette affaire. M. de M. a fait au public sa relation en homme d’Eglise, & trempant sa plume dans ce miel empoisonné qui tue, il s’est ménagé tous les avantages de son état. Pour moi, Monsieur, je vous serai la mienne du ton simple dont les gens d’honneur se parlent entr’eux. Je ne m’étendrai point en protestations d’être sincere. Je laisse à votre esprit sain, à votre