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est un quartier de rocher très- imposant ; car suspendu presqu’en l’air il porte à faux par un de ses angles, & penche tellement en avant qu’il semble se détacher & partir pour écraser le spectateur. Je ne doute pas, cependant, qu’il ne soit dans cette situation depuis bien des siecles & qu’il n’y reste encore plus long-tems mais ces sortes d’équilibres auxquels les yeux ne sont pas faits ne laissent pas de causer quelqu’inquiétude, & quoiqu’il fallût peut-être des forces immenses pour ébranler ce rocher qui paroît si prêt à tomber, je craindrois d’y toucher du bout du doigt, & ne voudrois pas plus rester dans la direction de sa chûte que sous l’épée de Damoclès.

La galerie souterraine à laquelle cette grotte sert de vestibule ne continue pas d’aller en montant, mais elle prend sa pente un peu vers le bas, & suit la même inclinaison dans tout l’espace qu’on a jusqu’ici parcouru. Des curieux s’y sont engagés à diverses fois avec des domestiques, des flambeaux & tous les secours nécessaires ; mais il faut du courage pour pénétrer loin dans cet effroyable lieu, & de la vigueur pour ne pas s’y trouver mal. On est allé jusqu’à près de demi-lieue en ouvrant le passage où il est trop étroit, & sondant avec précaution les gouffres & fondrieres qui sont à droite & à gauche ; mais on prétend dans le pays qu’on peut aller par le même souterrain à plus de deux lieues jusqu’à l’autre côté de la montagne, où l’on dit qu’il aboutit du côté du lac, non loin de l’embouchure de la Reuse.

Au-dessous du bassin de la même cascade, est une autre grotte plus petite, dont l’abord est embarrassé de plusieurs