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un ressort dans la mécanique morale, mais il repousse toujours la main qui le fait agir. Faisons quelques observations nécessaires pour notre objet.

Nous voulons que l’enfant soit cher à sa gouvernante. Il faut pour cela que le fort de la gouvernante soit lié à celui de l’enfant. Il ne faut pas qu’elle dépende seulement des soins qu’elle lui rendra, tant parce qu’on n’aime gueres les gens qu’on sert, que parce que les soins payés ne sont qu’apparens, les soins réels se négligent ; & nous cherchons ici des soins réels.

Il faut qu’elle dépende non de ses soins, mais de leur succès, & que sa fortune soit attachée à l’effet de l’éducation qu’elle aura donnée. Alors seulement elle se verra dans son Eleve s’affectionnera nécessairement à elle ; elle ne lui rendra pas un service de parole & de montre, mais un service réel ; ou plutôt, en la servant, elle ne servira qu’elle-même ; elle ne travaillera que pour soi.

Mais qui sera juge de ce succès ? La foi d’un pere équitable, & dont la probité est bien établie, doit suffire ; la probité est un instrument sur dans les affaires, pourvu qu’il soit joint au discernement.

Le pere peut mourir. Le jugement des femmes n’est pas reconnu assez sûr, & l’amour maternel est aveugle. Si la mere étoit établie juge au défaut du pere, ou la gouvernante ne s’y fieroit pas, ou elle s’occuperoit plus à plaire à la mere qu’à bien élever l’enfant.

Je ne m’étendrai pas sur le choix des juges de l’éducation. Il faudroit pour cela des connoissances particulieres relatives