Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t11.djvu/73

Cette page n’a pas encore été corrigée

que vous ayez même aucun soupçon de tous ce que je vous ai dévoilé ?

Rousseau.

Comment ? Vous m’étonnez. Cet engagement regardoit uniquement, du moins je l’ai cru le tems qu’il a falu mettre à m’expliquer les secrets affreux que vous m’avez révélés. De peur d’en brouiller le fil, il faloit ne pas l’interrompre jusqu’au bout, & vous ne vouliez pas que je m’exposasse à des discussions avec un fourbe, avant d’avoir toutes les instructions nécessaires pour le confondre pleinement. Voir. ce que j’ai compris de vos motifs dans le silence que vous m’avez impose, & je n’ai pu supposer que l’obligation de ce silence allât plus loin que ne le permettent la justice & la loi.

Le François.

Ne vous y trompez donc plus. Votre engagement, auquel vous ne pouvez manquer sans violer votre soi, n’a quant à sa durée d’autres bornes que celles de la vie. Vous pouvez vous devez même répandre publier par-tout l’affreux détail de ses vices & de ses crimes, travailler avec zele à étendre & accroître de plus en plus sa diffamation, le rendre autant qu’il est possible odieux méprisable exécrable à tout le monde. Mais il faut toujours mettre à cette bonne œuvre un air de mystère & de commisération qui en augmente l’effet, & loin de lui donner jamais aucune explication qui le mette à portée de répondre & de se défendre, vous devez concourir avec tout le monde à lui faire ignorer toujours ce qu’on fait & comment on le fait.

Rousseau.