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livre une science qu’il n’entend point, & bien plus encore dans un Art dont la seule langue exige une étude de plusieurs années avant qu’on puisse l’entendre & la parler. Je conclus donc qu’un homme qui n’a pu faire le Devin du Village parce qu’il ne savoit pas la musique, n’a pu faire à plus forte raison Dictionnaire qui demandoit beaucoup plus de savoir.

Le François.

Ne connoissant ni l’un ni l’autre ouvrage, je ne puis p moi-même juger de votre raisonnement. Je sais seulement qu’il y a une différence extrême à cet égard dans l’estimation du public, que le Dictionnaire passe pour un ramassis de phrases sonores & inintelligibles, qu’on en cite un article Génie que tout le monde prône & qui ne dit rien sûr la musique. Quant a votre article enharmonique & aux autres qui, selon vous, traitent pertinemment de l’Art, je n’en ai jamais oui parler à personne, si ce n’est à quelques Musiciens ou Amateurs étrangers qui paroissoient en faire cas avant qu’on les eût mieux instruits, mais les nôtres disent & ont toujours dit ne rien entendre au jargon de ce livre.

Pour le Devin, vous avez vu les transports d’admiration excites par la derniere reprise ; l’enthousiasme du public pousse jusqu’au délire fait foi de la sublimité de cet ouvrage. C’étoit le divin J. J. c’étoit le moderne Orphée ; cet Opéra étoit le chef- d’œuvre de l’art & de l’esprit humain, & jamais cet enthousiasme ne sut si vif que lorsqu’on sut que le divin J. J. ne savoit pas la musique. Or quoique vous en puissiez dire, de ce qu’un homme qui ne sait pas la musique n’a pu faire