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malheureux qui languissent dans les infectes vapeurs des mines, de noirs forgerons, de hideux cyclopes sont le spectacle que l’appareil des mines substitue au sein de la terre, à celui de la verdure & des fleurs, du ciel azuré, des bergers amoureux & des laboureurs robustes sur sa surface.

Il est aisé, je l’avoue, d’aller ramassant du sable & des pierres, d’en remplir ses poches & son cabinet & de se donner avec cela les airs d’un naturaliste : mais ceux qui s’attachent & se bornent à ces sortes de collections sont pour l’ordinaire de riches ignorans qui ne cherchent à cela que le plaisir de l’étalage. Pour profiter dans l’étude des minéraux, il faut être chimiste & physicien ; il faut faire des expériences pénibles & coûteuses, travailler dans des laboratoires, dépenser beaucoup d’argent & de tems parmi le charbon, les creusets, les fourneaux, les cornues, dans la fumée & les vapeurs étouffantes, toujours au risque de sa vie & souvent aux dépens de sa santé. De tout ce triste & fatigant travail résulte pour l’ordinaire beaucoup moins de savoir que d’orgueil, & où est le plus médiocre chimiste qui ne croye pas avoir pénétré toutes les grandes opérations de la nature pour avoir trouvé, par hasard peut-être, quelques petites combinaisons de l’art ?

Le regne animal est plus à notre portée & certainement mérite encore mieux d’être étudié. Mais enfin cette étude n’a-t-elle pas aussi ses difficultés ses embarras, ses dégoûts & ses peines ? Surtout pour un solitaire qui n’a ni dans ses jeux ni dans ses travaux d’assistance à espérer de personne. Comment observer, disséquer, étudier, connoître les oiseaux dans