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j’ai à proposer, toutes les difficultés sont levées, tous les abus sont prévenus, & ce qui sembloit faire un nouvel obstacle se tourne en avantage dans l’exécution.

CHAPITRE XIV.

Election des Rois.

Toutes ces difficultés se réduisent à celle de donner à l’Etat un chef dont le choix ne cause pas des troubles & qui n’attente pas à la liberté. Ce qui augmente la même difficulté est que ce chef doit être doué des grandes qualités nécessaires à quiconque ose gouverner des hommes libres. L’hérédité de la Couronne prévient les troubles, mais elle amene la servitude ; l’élection maintient la liberté, mais à chaque regne elle ébranle l’Etat. Cette alternative est fâcheuse, mais avant de parler des moyens de l’éviter, qu’on me permette un moment de réflexion sur la maniere dont les Polonois disposent ordinairement de leur Couronne.

D’abord, je le demande ; pourquoi faut-il qu’ils se donnent des Rois étrangers ? Par quel singulier aveuglement ont-ils pris ainsi le moyen le plus sûr d’asservir leur nation, d’abolir leurs usages, de se rendre le jouet des autres Cours, & d’augmenter à plaisir l’orage des interregnes ? Quelle injustice envers eux-mêmes, quel affront fait à leur patrie, comme si, désespérant de trouver dans son sein un homme digne de les