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de s’en prévaloir. S’il y avoit des cas de protestation contre la Diete, ce qui ne peut être tant qu’elle sera libre & complete, ce seroit aux Palatinats & Diétines que ce droit pourroit être conféré, mais jamais à des Nonces qui comme membres de la Diete ne doivent avoir sur elle aucun degré d’autorité ni récuser ses décisions.

Entre le veto qui est la plus grande force individuelle que puissent avoir les membres de la souveraine puissance, & qui ne doit avoir lieu que pour les loix véritablement fondamentales, & la pluralité, qui est la moindre & qui se rapporte aux matieres de simple administration, il y a différentes proportions sur lesquelles on peut déterminer la prépondérance des avis en raison de l’importance des matieres. Par exemple, quand il s’agira de législation l’on peut exiger les trois quarts au moins des suffrages, les deux tiers dans les matieres d’Etat, la pluralité seulement pour les élections & autres affaires courantes set momentanées. Ceci n’est qu’un exemple pour expliquer mon idée & non une proportion que je détermine.

Dans un Etat tel que la Pologne où les ames ont encore un grand ressort, peut-être eût-on pu conserver dans son entier ce beau droit du liberum veto sans beaucoup de risque & peut-être même avec avantage, pourvu qu’on eût rendu ce droit dangereux à exercer, & qu’on y eût attaché de grandes conséquences pour celui qui s’en seroit prévalu. Car il est, j’ose le dire, extravagant que celui qui rompt ainsi l’activité de la Diete & laisse l’Etat sans ressource, s’en aille jouir chez lui tranquillement & impunément de la désolation publique qu’il a causée.