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obéir à leurs maîtres, à ne pas voler dans les poches, & à donner beaucoup d’argent aux fripons publics. S’ils ont des usages, c’est pour savoir amuser l’oisiveté des femmes galantes & promener la leur avec grâce. S’ils s’assemblent c’est dans des temples pour un culte qui n’a rien de national, qui ne rappelle en rien la patrie ; c’est dans des salles bien fermées & à prix d’argent, pour voir sur des théâtres efféminés dissolus, où l’on ne sait parler que d’amour déclamer des histrions, minauder des prostituées, & pour y prendre des leçons de corruption, les seules qui profitent de toutes celles qu’on fait semblant d’y donner ; c’est dans des fêtes où le peuple toujours méprisé est toujours sans influence, où le blâme & l’approbation publique ne produisent rien ; c’est dans des cohues licencieuses pour s’y faire des liaisons secrètes, pour y chercher les plaisirs qui séparent isolent le plus les hommes, & qui relâchent le plus les cœurs. Sont-ce là des stimulans pour le patriotisme ? Faut-il s’étonner que des manières de vivre si dissemblables produisent des effets si différens, & que les modernes ne retrouvent plus rien en eux de cette vigueur d’ame que tout inspiroit aux anciens ? Pardonnez ces digressions à un reste de chaleur que vous avez ranimée. Je reviens avec plaisir à celui de tous les peuples d’aujourd’hui qui m’éloigne le moins de ceux dont je viens de parler.