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PRONONCÉ PAR J. J. ROUSSEAU. 329

qu’il s’agit de décider, pour toute la postérité, si mon nom, qui doit vivre, y doit passer avec opprobre ou avec gloire. On a pris les mesures les plus étonnantes pour me cacher à jamais et mes vils accusateurs et leurs sourdes impostures, qu’il rendront publiques sitôt que je ne vivrai plus. Sentant leurs secrètes atteintes sans voir ni l'instrument ni la main qui les porte, quel moyen de me défendre, ne sachant ni par qui ni de quoi je suis accusé ? Un seul, c'est d’exposer naïvement et fidèlement le bien, le mal et tous les détails de ma vie, et de laisser ensuite comparer et juger. Vous êtes les premiers, vous serez probablement les seuls à qui j’aurai fait ce récit, les seuls par conséquent qui, ayant entendu les deux parties, serez juges compétents de la vérité.

Je prie les dames qui ont la bonté de m’écouter de vouloir bien songer qu’on ne peut se charger de la fonction de confesseur sans s’exposer aux inconvénients qui en sont inséparables, et que, dans cet austère et sublime emploi, c'est au cœur à purifier les oreilles. Pour moi, je me suis mis dans la nécessité de remplir fidèlement le mien, qui n’est pas seulement d’être toujours fidèle et vrai, mais encore de vaincre la honte et de la sacrifier à la vérité.

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