punisse de né s’être pas fait un entendement a contraire à celui qu’il a reçu de lui ? Si un docteur venait m’ordonner de la part de Dieu de croire
qui semble animer les incrédules : c’est que la raison humaine n’a pas de mesure commune bien déterminée, et qu’il est injuste à tout homme de donner la sienne pour règle à celle des autres, Supposons de la bonne foi, sans laquelle toute dispute n’est que du caquet. Jusqu’à certain point il y a des principes communs, une évidence commune ; et de plus, chacun a sa propre raison qui le détermine ainsi ce sentiment ne mène point au scepticisme ; mais aussi, les bornes générales de la raison n’étant point fixées, et nul n’ayant inspection sur celle d’autrui, voilà tout d’un coup le fier dogmatique arrêté. Si jamais on pouvait établir la paix où règnent l’intérêt, l'orgueil l’opinion, c’est par là qu’on terminerait à la fin les dissensions des prêtres et des philosophes. Mais peut-être ne serait-ce le compte ni des uns ni des-autres : il n’y aurait plus ni persécutions ni disputes ; les premiers n’auraient personne à tourmenter les seconds personne à convaincre ; autant vaudrait quitter le métier.
Si l’on me demandait là-dessus pourquoi donc je dispute moi-même je répondrais que je parle au plus grand nombre, que j’expose des vérités de pratique, que je me fonde sur l’expérience, que je remplis mon devoir, et qu’après avoir dit ce que je pense je ne trouve point mauvais qu’on ne soit pas de mon avis.