Page:Rousseau - Œuvres complètes (éd. Dupont), tome 2, Discours, 1824.djvu/25

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Or, dans les matières de pur dogme, et qui ne tiennent point à la morale, comment peut-on juger de la foi d’autrui par conjecture ? comment peut-on même en juger sur la déclaration d’un tiers, contre celle de la personne intéressée ? Qui sait mieux que moi ce que je crois ou ne crois pas ? et à qui doit-on s’en rapporter là-dessus plutôt qu’à moi-même ? Qu’après avoir tiré des discours ou des écrits d’un honnête homme des conséquences sophistiques et désavouées, un prêtre acharné poursuive l’auteur sur ces conséquences, le prêtre fait son métier, et n’étonne personne ; mais devons-nous honorer les gens de bien comme un fourbe les persécute ? et le philosophe imitera-t-il des raisonnements captieux dont il fut si souvent la victime ?

Il resterait donc à penser, sur ceux de nos pasteurs que vous prétendez être sociniens parfaits et rejeter les peines éternelles, qu’ils vous ont confié là-dessus leurs sentiments particuliers. Mais, si c’était en effet leur sentiment et qu’ils vous l’eussent confié, sans doute ils vous l’auraient dit en secret, dans l’honnête et libre épanchement d’un commerce philosophique ; ils l’auraient dit au philosophe et non pas à l’auteur. Ils n’en ont donc rien fait, et ma preuve est sans réplique ; c’est que vous l’avez publié.

Je ne prétends point pour cela juger ni blâmer la doctrine que vous leur imputez ; je dis seulement qu’on n’a nul droit de la leur imputer, à moins qu’ils ne la reconnaissent ; et j’ajoute qu’elle