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honorer les gens, il faut que ce soit à leur manière et non pas à la nôtre, de peur qu’ils ne s’offensent avec raison des louanges nuisibles, qui, pour être données à bonne intention, n’en blessent pas moins l’état, l’intérêt, les opinions, ou les préjugés de ceux qui en sont l’objet. Ignorez-vous que tout nom de secte est toujours odieux, et que de pareilles imputations, rarement sans conséquence pour des laïques, ne le sont jamais pour des théologiens ?

Vous me direz qu’il est question de faits et non de louanges, et que le philosophe a plus d’égard à la vérité qu’aux hommes ; mais cette prétendue vérité n’est pas si claire ni si indifférente que vous soyez en droit de l’avancer sans de bonnes autorités, et je ne vois pas où l’on en peut prendre pour prouver que les sentiments qu’un corps professe et sur lesquels il se conduit ne sont pas les siens. Vous me direz encore que vous n’attribuez point à tout le corps ecclésiastique les sentiments dont vous parlez ; mais vous les attribuez à plusieurs ; et plusieurs, dans un petit nombre, font toujours une si grande partie, que le tout doit s’en ressentir.

Plusieurs pasteurs de Genève n’ont, selon vous, qu’un socinianisme parfait. Voilà ce que vous déclarez hautement à la face de l’Europe. J’ose vous demander comment vous l’avez appris : ce ne peut être que par vos propres conjectures, ou par le témoignage d’autrui, ou sur l’aveu des pasteurs en question.