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MIRABEAU.

son État. Il vécut assez pour éprouver qu’il ne pourrait jamais suffire, par son autorité, à tout ce que faisaient les grands quand ils étaient répandus dans le royaume, et que l’autorité arbitraire affaiblissait ou détruisait tous les ressorts et n’en remplaçait aucun. »

La longue habitude de commander a corrompu le prince ; la longue habitude d’obéir a corrompu le peuple. Quant aux « grands propriétaires, notables et magnats des provinces, rassemblés sous la main du Roi par l’appât du luxe et des honneurs, ils n’ont apporté dans la capitale que des ronces dorées. Dans cet ordre féodal, dont on a tant médit, c’était du moins une maxime constante que nul homme ne pouvait être taxé sans son consentement. »

Ainsi, à chaque effort de cet esprit en travail, on sent fermenter le levain séculaire qui, après avoir couvé sous les ruines des châteaux et des donjons démantelés par la monarchie, soulève, avec la poussière vengeresse de la féodalité vaincue, les germes rajeunis de la liberté populaire.

C’est la théorie arrogante du comte de Boulainvilliers ; c’est la déclamation séditieuse du marquis de Mirabeau dans l’Ami des hommes ; c’est, il faut le répéter, si étrange que ce rapprochement doive ici paraître, c’est « l’invasion des idées démocratiques dans un esprit féodal ».

Quant aux moyens de mettre un terme au despotisme, Mirabeau n’en propose nettement aucun.