Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/218

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
210
MIRABEAU.

ambiguë, de deviner son opinion et de bien saisir sa pensée.

Le 25 mars, malade, épuisé de fatigue, brisé par la souffrance, il monta cinq fois à la tribune. Quoi qu’on en ait pu dire, ce discours intermittent, fait de toutes pièces et préparé à la hâte, qui était plutôt une manœuvre parlementaire qu’une composition oratoire, ne peut pas compter parmi les meilleurs. Mais il est un de ceux où l’on peut juger le plus sûrement les procédés et la technique de cet habile stratégiste et de ce prodigieux compilateur. « Nous sommes dans un grand danger, écrivait-il au comte de Lamarck au milieu même d’une séance, soyez sûr qu’on veut nous ramener aux élections, c’est-à-dire à la destruction de la monarchie. Je porterai tous mes efforts à ajourner…. Envoyez chercher Pellenc immédiatement ; qu’il étudie dans le plus grand détail le décret : qu’il ne prenne que des notes ; mais qu’il les développe assez pour que je parle avec fécondité ;… gagnons du temps ; tout est sauvé. J’emmènerai Pellenc avec moi et nous y mettrons toutes nos forces. »

Ce tour de force — il disait bien — fut son dernier acte politique ; ce ne fut pas son dernier discours. En même temps que le projet de loi sur la régence, l’Assemblée discutait un projet de loi sur les mines. Dans cette question si difficile, les intérêts pécuniaires du comte de Lamarck étaient gravement engagés. Mirabeau ne voulut pas déserter une cause dans laquelle, après un examen rapide, le bien de