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MIRABEAU.

monarchie défend, seul, avec sa propre cause, la cause de la France et du roi.

Ce fut un grand scandale dans ce petit sénat, d’entendre un pareil langage tenu par un pareil homme, perdu de dettes et de débauches, interdit par arrêt de justice et deux fois contumace, qui cherchait dans les entreprises les plus dangereuses et dans la plus vile popularité la revanche du mépris public dont il se sentait accablé. Qu’avait-on à faire d’un tel compagnon, dont le seul voisinage mettait en péril l’honneur de la noblesse, et dont, il faut bien le dire, la supériorité trop manifeste semblait plus gênante encore que sa mauvaise renommée ? Ses titres même étaient-ils bien clairs ? Était-il, de son chef, détenteur d’un fief provençal ? Où était son contrat d’afflorinement ? — Et comme Mirabeau répondait avec dédain « qu’il n’avait pas ses archives dans sa poche », le syndic de robe, M. de Gassier, fut chargé d’éclaircir cette affaire avec M. l’abbé Decène, le généalogiste de la Provence. Mais en attendant qu’à eux deux ils eussent trouvé quelque expédient de procureur pour délivrer l’assemblée de cet orateur incommode, il lui fut fait défense provisoire d’entrer dans la salle des séances.

Si l’on espérait le faire taire pour si peu, c’était bien peine perdue. Ne pouvant plus discourir dans l’assemblée, Mirabeau fit, à la porte, un bruit terrible. Journaux, brochures, mémoires, pamphlets, ce fut, tous les jours et à toute heure un déluge d’écrits violents qui vint s’abattre sur ces malen-