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LE GRAND SILENCE BLANC

juin que, précédés par le vieux bull au pelage gris-fer, ils arrivent. On les voit s’avancer, le mufle large hors de l’eau, fortement moustachus ; ils donnent l’assaut au rivage ; comme leurs pattes postérieures sont dirigées en arrière, ils ne peuvent se soulever, leur marche est une succession de sauts où les muscles du tronc jouent le principal rôle.

S’aidant autant que possible des pattes de devant, ils cherchent la meilleure place. Pour qu’une place soit bonne, il faut qu’elle réunisse la triple condition d’être rapprochée du rivage, abritée du vent, exposée au soleil.

Hélas ! la place n’est pas au premier occupant, mais bien à celui qui sait la faire respecter.

Mordant, griffant, écrasant leur adversaire sous leur poids, les forts assurent leur conquête. Et le nombre des cicatrices qui couturent certaines peaux disent suffisamment les escarmouches livrées.

Lorsque la maison est en ordre, il n’y a plus qu’à attendre l’hôtesse. Celle-ci arrive quelques jours après.

La cité des Phoques a un gardien vigilant, qui, haut perché, signale l’approche du danger ou les événements mémorables. L’arrivée de Mesdames Phoques est un événement mémorable.

Par un cri guttural, qui tient du mugissement et du soufflet de l’orgue, le guetteur signale que ces dames sont en vue.