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LE GRAND SILENCE BLANC

que je l’aie agréée, elle s’accroupit près de moi et d’un coup net, elle tranche l’étoffe.

Le spectacle est monstrueux : la chair est grillée, tuméfiée, des boursouflures se forment qui éclatent avec de minces jets de sang. Les veines et les artères sont à nu, elles crèvent aussi, une à une. C’est un enchevêtrement de lacets rouges et bleus où le sang qui se coagule fait une tache grenat sombre.

Nos mains se sont rencontrées. La mienne tremble un peu. Celle de Jessie est souple et froide. Je regarde la jeune femme et je revois dans ses yeux la courte flamme de la veille.

Cette chair qui souffre un châtiment de damné cause de la joie aux yeux de cette femme. J’en jurerais.

Je donne un ordre bref. Avec d’infinies précautions, on soulève le corps douloureux, on l’emporte, cependant que Jessie Marlowe murmure à mi-voix, comme pour elle-même :

— Quelle splendide chose que ces vives couleurs !