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LE GRAND SILENCE BLANC

et si cela peut vous être agréable, féroce postier, je lui ai fermé les yeux à ce garçon, et s’il y a une justice quelque part, dans un paradis, Jack Nichols a sa place auprès de ceux qui ont souffert le supplice de la vie.

Il a eu une agonie atroce, un accident banal, un bloc lui avait écrasé les deux jambes… et cette agonie n’était rien à côté de celle qu’il a subie des mois et des mois sous le cercle polaire.

La fièvre le tenait. Son esprit battait la campagne et j’ai su… J’ai su la vie d’abnégation et de courage de cet être, qui était né pour une vie paisible, dans la quiétude d’un cabinet de travail, parmi l’ombre amicale des livres qui sont chers et des bibelots rares qu’on a su assembler avec un soin jaloux…

Mais une femme passe qui bouleverse tout, sa jupe en coup de vent renverse les plus beaux projets… La vie est mesquine, quotidienne, les gazettes rapportent les succès mirifiques des coureurs d’aventures.

L’or, donneur de fortune, est là, il n’y a qu’à se donner la peine de le prendre. Mais pour le prendre, faut-il encore l’aller chercher.

La jolie poupée à cervelle étroite veut être aussi belle, aussi attifée que ses amies… Quoi, elle va traîner sa misérable existence en attendant quoi ? Dans vingt ans, un succès problématique ?

Les querelles éclatent qui gâchent le bel amour.

— Vous n’êtes qu’une poule peureuse.