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LE GRAND SILENCE BLANC

met d’espérer la venue des bateaux de ravitaillement.

C’est un spectacle féerique dans le mystère de ces contrées silencieuses que celui du craquement monstrueux qui annonce le dégel.

Sous la rude poussée du fleuve, la glace casse, les blocs se heurtent, s’entre-choquent et se précipitent. On dirait un combat de monstres antédiluviens. Au lac Labarge, la sensation est grandiose : c’est la ruée des blocs qui essayent de passer tous à la fois ; malheur à l’embarcation du pilote inhabile qui, impatient, s’est aventuré sur le fleuve avant que les temps soient révolus !

Dès sa source, dans la région volcanique, qu’il a à traverser, il forme de nombreux lacs qui sont d’anciens cratères.

La pureté des eaux est telle que le paysage s’y reflète comme dans un miroir ; ce fait a frappé les premiers pionniers ; aussi, les mirror lakes sont légion dans toute la vallée.

Le Yukon descend les pentes rocheuses des monts Chilkoot ; ses eaux s’enfuient, dans des couloirs, sombres et tortueux, étranglés dans les immenses parois à pics des roches de basalte ; elles sautent de cascades en cascades, augmentées par les eaux des torrents issus des glaciers.

Gregory Land prend sa respiration, puis il repart sur le ton d’un maître d’école :

— Il reçoit, à droite et à gauche, d’importants affluents, la Hotalinqua, la Newberry, la