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LE GRAND SILENCE BLANC

Platon : Apologie de Socrate ; Ésope : Fables choisies ; d’autres gisent avec de gros dictionnaires sur une caisse renversée qui sert de table de nuit, mais j’ignorerai toujours quels en sont les auteurs. César Escouffiat a replacé sur sa tête son chapeau haut de forme. Il se tourne alors vers moi ; d’un large geste, il se découvre et me salue, puis il me dit :

— Le monde est plein d’imprévu. Je suis heureux de vous avoir rencontré. Nous reverrons-nous ? c’est peu probable. Qui sait sa destinée ? Tout naît, tout meurt, disent les uns, rien n’a été engendré, rien ne périra, disent les autres ; qui croire ? Le mieux pour l’homme serait de ne pas naître ainsi que nous l’explique Sophocle du 1215e au 1220e vers d’Œdipe à Colone.

Et César Escouffiat conclut, nettement, en bon français, cette fois :

— Je ne vous retiens pas.



Devant le bar, je trouve Gregory Land qui m’attend, l’air goguenard, les mains aux poches.

Il cligne de l’œil selon son habitude et me crie d’aussi loin qu’il m’aperçoit :

— Eh bien ! garçon, pour un drôle de type,