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LE GRAND SILENCE BLANC

dort du sommeil de ceux qui ont conscience d’avoir bien accompli leur journée.



Des aboiements me réveillent en sursaut. C’est Gregory Land qui rosse d’importance deux de ses chiens. Les bêtes cinglées hurlent, les crocs dehors, les oreilles rabattues, le regard mouillé de larmes. Le fouet en lanière de cariboo se déroule et enveloppe, tour à tour, les flancs de chaque chien.

Gregory a la justice dans le sang. À chaque coup, il compte : un pour Ruf, un pour Chappy…

Je veux intervenir, Gregory m’arrête du geste.

— Laissez, sir, laissez, c’est cette rosse de Chappy qui voulait prendre la place du leader.

— Mais pourquoi fouetter Ruf alors ?

— Parce que Ruf est un fils de porc, qu’il est lâche comme un lièvre et qu’il tremble de tous ses membres devant cette satanée femelle de Chappy.

Gregory n’aimait pas les lâches, c’est pourquoi Ruf eut deux coups supplémentaires.

Les autres chiens attendent, impassibles, que la correction soit terminée ; chacun est rangé, à