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« non seulement à la pratique des préceptes mais aussi des conseils Évangéliques, et à la perfection. »

Le 3e concile de Milan dit encore « que les prédicateurs doivent exhorter les difèles au mépris du monde, à la perfection de la vie chrétienne, et à la pratique des conseils. » C’est là l’esprit de l’Évangile, l’esprit de l’Église ; c’est là le triomphe de l’amour divin. — Heureux donc celui qui a compris et réalisé dans sa conduite la perfection conseillée par Jésus-Christ et pratiquée par tant d’héroïques vierges ! Heureux l’homme qui a choisi la meilleure part, la vie de l’esprit ! Heureux l’anachorète qui, éloigné des hommes, mène une vie angélique ! Heureux surtout, et brillants comme le soleil, les Pierre d’Alcantara et les Jean de la Croix, qui, embrasés d’un feu tout céleste, portent par l’éloquence divine de leurs discours les grandes âmes à embrasser une perfection sublime ! Heureux les maîtres et les disciples ardents de cette École Mystique, qui, depuis l’Apôtre bien-aimé et Denis l’Aréopagite, jusqu’à Marie Boudon et Bernières-Louvigny, a compté tant de glorieuses conquêtes dans tous les rangs de la société chrétienne ! Heureux ceux-là, et tous ceux qui viendront pour répandre comme eux les paroles d’amour qui enfantent l’héroïsme et qui peuplent la solitude des anges de la terre !

D’après tout ce que nous venons de lire, ne devons-nous pas être dans les sentiments du Solitaire Chasteuil, dont la vie tranquille et méditative était incomprise et blâmée par le monde ?

« Le monde, nous dit son historien, croyait produire un grand effet sur Chasteuil en traitant de sauvage cette vie de silence et de méditation. Loin de s’en émouvoir, il s’étonnait de ce que le monde, si rempli de déceptions, de douleurs et de désastres, eut néanmois la prétention d’être le seul lieu ou l’on put vivre heureux. Aussi le Solitaire avait-il bien réellement pitié de ce monde qui semblait avoir pitié de lui. C’est alors que nautonnier hors des flots, il voyait à ses pieds d’un œil peu séduit ces misères orageuses que le monde appelle ses honneurs, ses plaisirs ; et qu’il aimait à répéter le cri que le roi prophète poussait du haut du trône : J’ai levé les yeux vers les montagnes d’où le secours me viendra ; c’est alors qu’il comprenait le Christ pleurant sur les femmes de Jérusalem qui pleuraient sur lui. » (Danielo.)

 
An envious world will interpose its frown
To mar delights superior to its own.

(Cowper.)

 
How is the world deceiv’d by noise and show ;
Alas, how different to pretend and know !
Like a poor highway brook, pretence runs loud,
Bustling, but shallow, dirty, weak and proud : —
While like some nobler stream, true knowledge glides
Silently strong, and its deep bottom hides.

(Hill.)

 
So millions are smit with the glare of a toy ;
They grasp at a pebble, and think it a gem,
And tinsel is gold, if it glitter to them..

(Marsden.)

 
The world can never give
The bliss for which we sigh..

(Montgomery.)

« Dans le monde, on se sent oppressé par ses facultés, et l’on souffre d’être seul de sa nature au milieu de tant d’êtres qui vivent à si peu de frais. » (Mme de Stael.)

« La vertu qui ne se prête pas aux usages du monde passe pour un vice d’humeur ; le vice qui s’y accommode est regardé comme une vertu de société. » (Valéry.)

« Dans le monde, les uns aiment l’argent, les autres le pouvoir, les autres la renommée ; tous aiment leur volonté particulière. C’est à qui n’obéira pas ; c’est, j’ose le dire, à qui marchandera le mieux pour avoir le ciel à meilleur prix ; on ne donne rien à Jésus de ce que l’on croit pouvoir impunément retenir………

« On se paie de mille défaites pour vaquer avant tout aux misérables soins de la fortune, de l’avancement, du bien-être ; on se figure que la gloire de l’Église est intéressée à ce qu’on devienne riche, influent, à ce qu’on rie et qu’on se porte bien ; on outrage la foi par mille