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accorde à peine une attention distraite. On y est ensorcelé par le prestige de la bagatelle. Dans le monde, se taire, c’est presque toujours une impolitesse ; et, le plus souvent, parler, c’est une impertinence. On y est condamné à entendre répéter mille fois les mêmes bons mots, qui ont le triste avantage d’être beaucoup plus méchants qu’ils ne sont spirituels. Moins on a de cœur, plus on a d’esprit. Avoir et faire de l’esprit, c’est manquer de bon sens ; c’est manquer surtout du sens intérieur et mystique des choses élevées ; c’est manquer de charité. Faire de l’esprit, c’est fausser les relations des choses. L’esprit n’est rien ; les démons ont beaucoup d’esprit. C’est l’amour qui est tout. Il y a un esprit qui est aussi fin que charitable, c’est celui des saints. St-François de Sales avait cet esprit. Dans le monde, il faut faire de l’esprit ; il faut rire et faire rire, s’amuser et amuser les autres. Il faut y supporter la superbe outrecuidance, l’impertinente fatuité et l’étourdissant bavardage de ces essaims parfumés d’imberbes papillons, qui voltigent autour de leurs vaines idoles, dans les salons lambrissés des vulgaires parvenus d’une aristocratie d’argent et de serre-chaude.

Qu’aurait fait Atala, dans cette tiède et fade atmosphère du bas-empire des médiocrités envieuses et intolérantes qui y règlent la mode et y gouvernent l’opinion, avec une imperturbable suffisance ? Aurait-elle pu respirer dans