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larmes ne se glacent pas dans ses yeux ? La tigresse sent l’aiguillon de l’amour et se roule en rugissant sur le sable embrasé : Mais cette vierge, qu’enfanta la nuit, et dont le jour fut ébloui, cette fille du mystère est aussi froide et aussi dure que le marbre des tombeaux ! Je peux tirer des étincelles du silex, dont j’arme le bout de mes flèches ; mais je n’ai pu tirer une étincelle du cœur frigide de cette fille de la nuit, de ce cœur qui est plus dur que le silex ! … Mais peut-être ai-je tort de l’accuser ainsi. N’est-elle pas plus heureuse comme elle est ? Et le Grand-Esprit, le Maître de la vie, ne me punirait-il pas d’avoir troublé la paix de cette âme candide, et la solitude de cette vierge enfantine ? Elle a eu raison de me comparer au crocodile se roulant dans son lit de noir limon. La passion est égoïste, elle est cruelle, elle est sauvage ! C’est assez que je sois malheureux : Pourquoi faire le malheur de cette fleur de la nuit, qui répand dans le désert son parfum, aussi suave que le parfum du lys ? … Brise-toi, toi-même, ô mon cœur ; mais ne brise pas le cœur de cette chaste et naïve enfant ! Oui, brise-toi, transperce-toi d’une flèche empoisonnée ; mais laisse vivre en paix cette innocente et mélancolique beauté ! … Adieu, forêts, prairies, lacs, fleuves, nature sauvage, ô ma mère ! adieu ! … adieu ! … adieu pour tour jours ! »

Au moment où il saisit la flèche empoisonnée