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tant aimé ? Aimer une fois, n’est-ce pas aimer toujours ? … O grande nature, ô ma mère ! dis-lui, si le désespoir ne remplace pas dans le cœur l’absence de celle qu’on a aimée ; dis-lui, s’il reste autre chose qu’un tombeau pour celui qui n’a plus l’espoir de dormir dans la couche nuptiale avec celle qu’il avait choisie ; dis-lui oui, dis-lui les sanglots que tu as entendus, les larmes répandues dont tu as été témoin ! … O nuages, vous n’avez pas assez de larmes pour pleurer avec moi la perte de celle qui s’enveloppe dans la nuit de sa beauté, et qui se couvre d’un manteau de glace, pour éteindre les flammes de mon amour, et pour donner à mon cœur brisé le frisson du sépulcre, et la dureté de son cœur, plus glacé que la mort elle-même… O homme  ! la femme ne t’enfante que pour que tu vives, abreuvé de ses larmes brûlantes, et enveloppé des linceuls que tissent ses mains habiles pour étouffer ta vie avant l’heure de la mort ! …

« Où irai-je pour cacher ma désolation ? Oh ! qui m’emportera loin de ces lieux, qui ne sont remplis que de l’image de celle qui n’a jamais senti, jamais aimé, jamais souffert et pleuré ; de celle qui ignore la douleur, comme elle ignore la joie ; et qui vit solitaire, comme elle vit inféconde ? Qui m’emportera dans des lieux, où les entrailles de la femme ne sont pas pétrifiées, et où les