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de tous ces hommes qui ne connaissent que les affaires ; et qui, dans leur aveuglement, oublient la seule grande affaire ? Qu’aurais-tu fait dans le grand marché public où tout s’expose, s’évalue et se vend ? Ah ! tu n’étais pas fait pour y paraître une seule fois, et Dieu t’a donné des ailes pour t’envoler dans la solitude du désert ! … O désert ! tu es l’arche sainte dans laquelle se sont sauvées du déluge des passions orageuses toutes ces âmes qui aimaient Dieu, et que Dieu y a poussées avec amour. Il est doux de naître, il est plus doux de vivre, il est cent fois plus doux de mourir dans la solitude, où expirent toutes les voix humaines, pour ne laisser entendre que la voix de Dieu !

Atala ! —Ai-je besoin de dire qu’elle était poète ? Née sous le signe de la Vierge, son berceau avait été ombragé par d’harmonieux pins, qui s’élevaient tout près de la demeure de sa mère. On avait de bonne heure compris qu’il fallait à cette organisation délicate le grand air, l’espace et la lumière ; qu’il lui fallait ce qu’il faut aux oiseaux du ciel et aux fleurs des montagnes : Est-il étonnant alors qu’elle ait toujours eu une particulière et inexplicable affection pour les arbres, et surtout pour les hauts pins, les vieux chênes et les cyprès chevelus ? La vue de leurs troncs, de leurs branches, de leurs feuilles et de leurs fleurs la ravissait, comme n’eût pas fait le plus beau tableau d’un grand