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gesse. » Une jeune Indienne, qui avait été baptisée, se voyant sans cesse persécutée à cause de sa religion par ses parents et par tous ceux de sa tribu, et connaissant la retraite de la Blanche Sauvagesse, s’y était réfugiée et y avait reçu l’hospitalité fraternelle : Atala avait donc maintenant une compagne, une amie, une gardienne. Avec cette enfant des bois, quelle inquiétude pouvant-elle avoir, elle qui n’en avait aucune, avant de l’avoir connue ? On distinguait à peine l’une de l’autre, tant la fille de la civilisation était devenue l’hôte des bois et de la nature. Sans parler le même langage, elles se comprirent bientôt comme les oiseaux se comprennent : D’abord, par des regards, par des gestes ; ensuite, par des cris ; et, enfin, par une langue articulée qu’elles seules parlaient et entendaient : Appuyant les voyelles sur les consonnes, elles trouvèrent dans l’organe humain une touche pour rendre chaque bruit, chaque son de la nature ; elles traduisirent leurs pensées et leurs sentiments dans le langage, comme on les traduit dans la peinture et la musique ; et ce langage fut à la fois figuré, plein de riche coloris et vibrant d’harmonie imitative : C’était une explosion soudaine et spontanée de l’âme et de l’esprit dans une combinaison intuitive de consonnes vocalisées. Saint-Hildegarde s’était ainsi composé une langue mystique qu’elle seule comprenait.