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annales héroïques, leurs poétiques légendes ; et les premiers siècles du Christianisme n’ont jamais été surpassés ni égalés par les siècles qui ont suivi : Le sang des martyrs et les larmes des solitaires ont inondé et parfumé le sol de l’Orient !

Pour que le peuple Américain produise des héros et des Saints, des martyrs et des solitaires, faut-il donc attendre sa vieillesse ? Non ! c’est maintenant l’âge des grandes et généreuses entreprises, le temps de l’épopée nationale et mystique ! à vous donc, ô jeunesse du Nouveau-Monde, à vous la belle et sainte mission de faire fleurir la vertu et germer l’héroïsme ; à vous de consoler l’Église et de sauver la patrie ; à vous de répondre à toutes les espérances de la religion et de l’humanité :


La vertu n’attend pas le nombre des années.


La grâce, qui est un don gratuit de l’amour divin, n’est subordonné à aucun ordre naturel, social ou politique. Le mot seul de grâce suffit pour réfuter toutes les objections, contre une vocation ou des vocations contemplatives, tirées du temps, des lieux ou de l’état de la société. La grâce n’est pas relative, progressive, dépendante des circonstances locales, sociales ou domestiques ; elle vient inopinément ; elle agit et opère des merveilles, là où l’on s’y attendait le moins ; elle déconcerte toute la sagesse et toutes les prévisions des hommes pratiques ; elle vient comme un doux zéphire ou comme une tempête ; elle attire ou foudroie, c’est une invasion soudaine ou une lente pénétration. La grâce, c’est l’Esprit de Dieu, et l’Esprit de Dieu souffle il veut, quand il veut et comme il veut La grâce est un mystère d’amour divin ! Elle choisit une pauvre paysanne, et elle en fait Geneviève ou Jeanne-d’Arc ; une humble sauvagesse, et elle en fait la Bonne Catherine Tégahgouïta. Vouloir préciser, circonscrire ou définir son mode d’action, dans tel état social donné, ou telles circonstances de temps, de lieux ou de personnes, c’est vouloir poser des bornes à l’action divine, à l’amour, à la miséricorde. « Bien des personnes s’étonnent, disait un jour le Sauveur à Ste-Brigitte, que je vous aie choisie pour m’entretenir avec vous de préférence à tant d’autres, dont la vie est plus sainte, et qui sont consacrés depuis longtemps à mon service ; mais il m’a plu d’en agir ainsi, non parce que vous êtes plus digne de cette faveur, mais parce que telle est la volonté de votre Dieu, qui donne la sagesse aux insensés