Je dépose en priant mon livre sur ta tombe ! —
Ce livre, où je m’exprime aven le rude accent
Qu’inspire aux hommes doux la haine du méchant :
Car, dans mon sein brûlant d’une céleste flamme,
Tu mis l’esprit de l’homme et le cœur de la femme ;
La force inébranlable et la suavité ;
Oui, la douceur unie avec la fermeté ;
Et j’appris des forêts, enfant libre et sauvage,
Le rhythme irrégulier qui vibre en mon langage !
J’appris de la Nature, en mes premiers transports,
L’extatique secret des mystiques accords !
Le Pape et les Souverains temporels.
Depuis que Jésus-Christ établit sur la pierre
L’Édifice éternel, le Siège de Saint Pierre ;
Depuis le règne illustre, où le grand Constantin
De l’Église naissante affermit le destin :
Oh ! que n’a pas souffert le Pontife de Rome
De chaque Roi fidèle et chaque Saint Royaume ?
Je t’ai suivi naguère, ô Père inconsolé,
Par tes propres enfants à Gaëte exilé ;
Et ton cœur paternel, plus triste encore, saigne,
En voyant s’insurger la pieuse Sardaigne ! —
Et toi sournoise Autriche, en ton obliquité ;
Colorant tes forfaits d’un fard de piété,
Tu profanas du Sceau de la Chancellerie
Les documents divins de l’Église asservie ! —
J’ai lu tous les récits des spoliations,
Des sacriléges vols des vieilles Nations !
J’ai lu tout ce qu’a fait la Catholique Espagne,
Qu’en ces jours de malheur le vertige accompagne !
Non, je n’aurai jamais à déplorer ici,
Tant de crimes, éclos d’un orgueil endurci !
Je sais le cœur altier de la France gâtée,
De la France dévote, avec son Code athée,
À l’Église opposant son esprit Gallican,
Et son Louvre royal au Papal Vatican !
Et son Napoléon, froid sphinx énigmatique,
Dictateur militaire au cœur démocratique,
Sur la force appuyant son règne temporel,
Semble braver l’Europe et les foudres du ciel :
On a pu l’appeler un nouveau Charlemagne,
Mais qu’il ose enlever un pied de la Romagne ;