PRÉFACE.
Ce n’est pas sans une raison profonde que l’on a dit « la République des lettres », et ce n’est pas sans une sagesse également profonde que Platon voulait bannir de sa République les poëtes impies : c’est que la République et la Liberté vivent de Religion et de vertus, les poëtes doivent être des chantres sacrés, des hymnographes patriotiques.
Toute poésie, digne de ce nom, a une origine céleste et une destination religieuse et sociale. Le but moral et pratique de la poésie, comme de tous les beaux-arts, c’est de faire resplendir le vrai sous la forme du beau, pour nous émouvoir, nous exciter à admirer, à aimer et à accomplir le bien ; c’est de faire rayonner l’idéal, pour nous porter à le réaliser dans notre conduite, afin d’idéaliser notre vie, en la rendant conforme à la vérité, à la vertu, à la sainteté divine.
Toute poésie, qui ne se propose pas ce but, ne vient pas du ciel, n’est pas la vraie et bonne poésie ; et c’est en vain qu’elle voudrait usurper ce titre glorieux et sacerdotal.
La Muse est une prêtresse ; elle habite le temple ; elle porte sur son front virginal un bandeau étoilé ; elle enseigne les lois rhythmiques de l’ordre et de l’harmonie, les lois de la variété infinie ramenée à l’unité centrale. Quoique solitaire, en un sens, elle est sociale et catholique, tour à tour active et contemplative, guerrière sous le casque d’acier et extatique sous le voile claustral ; elle a ses accents d’amoureuse douceur et ses cris de colère terrible, elle est sereine dans son enthousiasme et enthousiaste dans sa sérénité, aussi puissante par sa prière silencieuse que par la véhémence de sa parole enflammée.
N’envisageant la poésie que sous ce point de vue élevé, qui seul