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blait qu’il avait mal compris, il lui fit répéter ce qu’il venait de dire. L’intendant lui annonça de nouveau que toutes ses richesses étaient disparues. Gaston ne put proférer une seule parole. Ce n’était pas la perte de ses biens qui le torturait le plus, mais c’était plutôt la pensée d’être obligé de renoncer à ses plaisirs, — il était radicalement méchant, — et de voir ses amis, ses prétendus amis l’abandonner, parce qu’il n’avait plus le sou pour les maintenir dans la débauche. Peu à peu le vide se fit autour de lui, et bientôt il fut plongé dans le plus complet isolement. Un soir, son concierge vint lui signifier l’ordre de quitter immédiatement sa chambre, parce qu’il devait deux mois de loyer et que son ameublement couvrait à peine la somme due. Gaston répondit avec un aplomb et une fermeté qui étonnèrent le concierge :

« Demain, à cette heure-ci, je serai loin de Québec. »

Le concierge se retira à cette réponse, et le lendemain Gaston avait quitté la vieille capitale du Canada.

Huit jours plus tard, nous retrouvons Gaston au milieu de la forêt de la Beauce. C’était par un jour d’été, et le soleil, qui arrivait au terme de sa course, allait disparaître bientôt derrière les sapins dont la cime s’élevait jusqu’à la nue.