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parce qu’elle se trouve située au bout de la terre de François Pagé.

« Quels sont ces deux hommes, me demanderas-tu ? Pour satisfaire ta légitime curiosité, je te répondrai immédiatement que c’était mon grand-père Jean Godin et Pierre Léveillé. Écoute leur conversation dans le silence de la nuit, et tu les reconnaîtras bientôt. Comme la chaloupe dédoublait la Pointe, mon grand-père dit à Léveillé :

« — Souffres-tu beaucoup, mon ami Pierre ?

« — Oh ! non, je crois que ce n’est rien. J’achève de m’envelopper la main avec un morceau de ma chemise, et, si je puis trouver un bout de planche, tu vas voir que les Anglais ne nous rattraperont pas aussi vite qu’ils le pensent. L’égratignure que j’ai reçue à la main n’est rien, mais ils ont cassé ma rame, les bandits !

« — Écoute, Léveillé, écoute donc. Les Anglais sont sur nous ; tu n’entends pas le bruit de leurs rames ? Il faut qu’ils voient clair comme des chats pour nous suivre ainsi à la piste. »

« En effet, deux chaloupes, montées chacune par huit rameurs, venaient de faire le tour de la Pointe et entraient dans l’anse.

« — Si je leur jouais un tour de ma façon, reprit mon grand-père ; c’est le seul moyen de nous débarrasser d’eux. Tu vas voir que je vais leur faire un beau pied de nez. »

« D’un coup de rame vigoureux, mon grand-père