Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome II, 1930.djvu/11

Cette page a été validée par deux contributeurs.

un temps assez considérable, nous entrons dans une petite baie, entourée de sapins aux rameaux toujours verts. Notre premier soin en abordant la rive est d’apaiser la faim dévorante qui nous tourmente depuis plus de deux heures ; l’air frais et pur que nous avons respiré à pleins poumons a passablement aiguisé notre appétit. Aussi, c’est avec une bien vive satisfaction que nous nous étendons nonchalamment sur la pelouse pour prendre notre frugal déjeuner.

Nous n’avons pas encore terminé notre repas, lorsque nous voyons apparaître sur la lisière de la forêt un vénérable vieillard, appuyé sur un énorme bâton et portant une longue barbe, qui lui tombe sur les épaules. Ce patriarche, au port noble et fier, s’approche de notre groupe en nous souhaitant la bienvenue dans un langage qui n’était connu que de nos illustres aïeux :

« Que Dieu soit avec vous, mes chers petits amis. »

Nous répondons par une profonde révérence : les cheveux blancs inspirent toujours le respect. Sur notre invitation, le visiteur vient s’asseoir à côté de nous, et la conversation, un moment interrompue, reprend son cours. Notre héros, — il méritait bien ce qualificatif, ce respectable vieillard, car il s’était conduit en brave à la bataille de Châteauguay, — nous raconte alors une foule d’histoires du temps passé, qui nous ont bien amusés. Nous ne les avons pas encore oubliées, surtout celle du pont construit