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tale. En arrivant, il s’engagea comme garçon d’écurie chez un laitier irlandais, qui était, cet hiver-là, chargé par le général Murray de fournir tout le lait nécessaire à la citadelle. Un jour, le laitier, n’ayant pas assez de domestiques pour faire son service ordinaire, envoya le jeune Léveillé distribuer le lait à la citadelle. Le jeune homme partit le cœur gros de joie. Ayant été en garnison à Québec quelques mois auparavant, il connaissait tous les cachots de la forteresse. Aussi il n’eut pas de peine à découvrir la prison où étaient enfermés nos deux amis. L’entrevue entre les deux frères et mon grand-père fut touchante, mais courte.

« Mon grand-père remit au jeune homme les papiers qu’il avait volés aux Anglais, en lui disant :

« — Pars immédiatement pour Jacques-Cartier avec ces documents, qui seront très précieux pour l’armée française. Tu salueras les parents et les amis et tu leur diras qu’au printemps Jean Godin et Pierre Léveillé seront au milieu d’eux. S’il en arrive autrement, c’est qu’il ne restera pas un seul Anglais sur la citadelle pour nous ouvrir la porte de notre cellule. Bon voyage et au revoir. »

« Je n’ai pas besoin d’ajouter que le jeune Léveillé, au lieu de prendre le chemin qui conduisait à l’habitation du laitier, s’engagea dans celui de Sainte-Foye pour se rendre plus vite au fort Jacques-Cartier, où son arrivée fut saluée avec les plus vifs transports d’allégresse par toute la population des Écureuils.